Parce que tu es mort...
J’en pleure encore la nuit, tu sais.
Je
réalise toujours pas, ça fait plus de cinq mois aujourd’hui et je m’attends
toujours le matin en me réveillant à te voir assis sur mon canapé en train de
boire un café en regardant des trucs débiles à la télé avec mon père.
Lorsque
quelqu’un frappe à la porte, je m’attends à ce que ce soit toi qui appuie sur la
poignet qui pousse la porte et qui rentre avec ta petite chemise
rose.
Lorsque
le téléphone sonne, je m’attends à entendre ta voix au bout du fil…
En
arrivant à la maison, je m’attends toujours à y voir ta voiture, ton
camion.
Je me
souviens de ta chemise rose, de ton manteau Magdunoise, je me souviens de tes
chaussures bateau, je me souviens de tes spartiates, de tes vieilles casquettes
sans forme, je me souviens de tes cheveux coiffés en couronne pour cacher le
haut de ton crane chauve, je me souviens de mains sèches.
Je me
souviens t’avoir choisi comme parrain, parce qu’ils nous avaient demandé de
choisir quelqu’un en qui on avait confiance et qui serait toujours là pour nous,
maintenant que t’es plus là, qui sera la pour moi ?
Je me
souviens de ce matin, j’étais encore dans mon lit, je ne dormais plus, mais je
t’entendais parler avec mon père et un autre homme, alors j’étais resté dans ma
chambre. Je me souviens de ce premier coup de téléphone, c’était ton dernier
fils, il voulait que mon père vienne vite, mais il n’était pas là, alors c’est
ma mère qui est parti chez toi.
Je me
souviens de cet autre appel ou on nous apprend que tu as eu un accident. Je
raccroche, je me retourne vers Sébastien et je lui dis « C’est rien, on va
aller le voir à l’hôpital et on se moquera de son crane chauve. » je préviens
mon père, il n’est pas inquiet, ça ne peut être rien de grave.
Je me
souviens de ce dernier appel, le silence de ma sœur au bout du fil. Je lui
demande ce qui se passe, et je l’entends pleurer et là je sais… « Gaby… Régis…il
est mort »
Je
raccroche, je me retourne vers mon frère et je m’effondre dans ses
bras.
Je me
revois traversant la ville, mon coffret de Buffy dans les bras… Tous les matins,
je me lève et j’espère que ce n’est qu’un rêve…
Je me
souviens de ta chemise rose, de tes mains sèches, de ton visage bandé. Je me
souviens de ton corps inerte dans cette boite en bois…
Le matin
quand je me lève, il n’y a personne assis dans mon canapé, personne derrière la
porte, personne au bout du fil, personne garé devant chez moi… Parce que tu es
mort…